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L'eau de Wallonie est soumises à plusieurs contraintes et sa qualité ne s'améliore pas au cours du temps. Face à la pression du nitrate et produits phyto sur certaines masses d'eau, comme dans les sables bruxelliens, tous les acteurs doivent se mobiliser.

Les agriculteurs disposent de leviers importants pour faire bouger les choses. Beaucoup s'y investissent déjà.

Les masses d'eau souterraine : un trésor

La Wallonie possède une ressource inestimable : ses 34 masses d'eau souterraine. Chaque année, presque 300 millions de m³ sont prélevés pour couvrir 75% des besoins en eau potable. La Wallonie couvre également 97% des besoins de Bruxelles et plus de 20% de ceux de la Flandre ! Le reste provient des eaux de surface (barrages, fleuves...).

C'est dire l'importance stratégique des masses d'eau souterraines de Wallonie !

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Normes de potabilité

75% de l'eau potable provient des masses d'eau souterraine. Elle fait l'objet de nombreux contrôles de qualité, tant à l'état "brut" (dans les nappes) qu'à la sortie du robinet. 

Elle ne doit contenir aucun micro-organisme, parasite, ni aucune substance constituant un danger potentiel pour la santé. Parmi les polluants analysés, les nitrates et pesticides sont ceux qu'on rencontre le plus souvent. Ils sont principalement issus des activités agricoles et font l'objet de seuils à ne pas dépasser :

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  • La teneur en nitrate ne peut pas dépasser 50 mg/l. Cette valeur est impérative : en cas de dépassement, l’eau est non-conforme et donc non potable. Le "traitement" par dilution et mélange est la solution généralement retenue. Dans certains cas, le captage est abandonné (entre 2000 et 2015, 23 captages ont été abandonnés, représentant 1.45 millions de m³ !).

  • Les teneurs en phytos (et sous-produits de dégradation de la substance initiale) ne peuvent dépasser 0,1 µg/l (1g/10 000 m3) pour chaque molécule prise individuellement et 0,5 µg/l au total. 18 produits phytos et métabolites font l'objet de mesures régulières en Wallonie. En cas de pollution, si l'opération est économiquement tenable, l'eau est traitée par filtration sur charbon actif (consommable de plus en plus cher). Autrement, le captage est abandonné. Entre 2000 et 2015, 14 captages ont été abandonnés à cause des contaminations, représentant 2.45 millions de m³).

Surveillance de la qualité

Les eaux souterraines "brutes" font l'objet de nombreux contrôles, de même que l'eau "du robinet". Les principaux distributeurs d'eau -responsables de 90 % des raccordements wallons - réalisent plus de 40.000 contrôles chaque année pour garantir que l'eau du robinet, après traitement, soit conforme aux normes de potabilité. 

Plus de 80 % des eaux brutes issues des ressources souterraines ne font l'objet d'aucun autre traitement que la désinfection et/ou l'aération, ce qui indique une assez bonne qualité globale des eaux souterraines de Wallonie. 

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Malheureusement, il reste 20% de l'eau souterraine qui ne répond pas aux normes fixées, le plus souvent à cause d'une pollution par le nitrate et/ou les pesticides. Pour que cette eau arrive au robinet en étant conforme aux standards de qualité, différentes options existent :

  • soit on dilue l'eau avec une eau de meilleure qualité de façon à revenir sous les seuils de qualité attendus (principalement dans le cas des nitrates),

  • soit on installe une unité de traitement pour supprimer les polluants présents dans l'eau avant distribution (cette solution a un coût pour la collectivité),

  • soit dans certains cas on procède à la fermeture pure et simple du captage.

Qualité des eaux souterraines wallonnes
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Certaines substances telles que le nitrate, les pesticides ou les hydrocarbures ne sont pas totalement éliminées en traversant les différentes couches du sol. Elles sont donc susceptibles de contaminer les nappes phréatiques. Le nitrate est l'élément le plus impactant dans les masses d'eau de Wallonie. Après le nitrate, les pesticides constituent le second facteur de dégradation de la qualité des eaux souterraines. Ils sont détectés dans 70% des sites de contrôles d'eau souterraine.

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En Wallonie, les activités agricoles contribuent majoritairement au mauvais état des eaux souterraines. Sur la période 2014-2019, 41% des masses d’eau n’atteignaient pas le bon état chimique. En cause : le nitrate (pour 11 des 34 masses d’eau en Wallonie) et les produits phyto (7/34). Ensuite, viennent les ménages et les services liés à la population, puis les activités industrielles et les anciens sites contaminés. 

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En ce qui concerne les problématiques nitrate et pesticides, certaines masses d'eau montrent une tendance à la dégradation, malgré les efforts entrepris.

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L'Union européenne et la Wallonie ont défini des objectifs qualitatifs à atteindre. Ces objectifs de bon état des masses d’eau n'ont pas été atteints en 2015 ni en 2021 comme c'était prévu. Le dernier délai est prévu en 2027. On sait déjà que le défi sera difficilement atteint.

Mesures de protection : un coût collectif

La protection des masses d’eau souterraines destinées à la consommation humaine est une nécessité. Mais le coût d'un traitement systématique contre les pesticides ou les nitrates est très élevé pour la communauté. Le coût direct des installations de traitement est estimé entre 7 et 10 millions € par an en Wallonie, selon les chiffres de l'ISSEP. Ce chiffre ne prend pas en compte une série d'éléments connexes : à titre d'exemple, un rapport du ministère de l'écologie français sorti en 2011 estimait que «le coût complet de ces excédents d'agriculture et d'élevage dissous dans l'eau serait supérieur à 54 milliards d'euros (jusqu'à 91 milliards) en France». L'étude prenait en compte les coûts des aides à l'agriculture, des nettoyages des captages eau, des traitements de l'eau, du nettoyage des littoraux (...) et la consommation d'eau en bouteilles (substitution face à une qualité de l'eau jugée médiocre).

 

Le principal traitement spécifiquement utilisé pour éliminer les pesticides consiste à faire passer l’eau sur un lit de charbon actif en grain ou en poudre sur sable. Il y a actuellement 119 stations de traitement utilisant ce procédé pour traiter l’eau distribuée en Wallonie. Les autres traitements pouvant éliminer ces substances utilisent les techniques de filtration par membrane (ultrafiltration, nanofiltration). On compte 7 stations de traitement par nanofiltration en Wallonie.

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Dans certains cas, le surcoût lié au traitement nécessaire implique l'abandon pur et simple d'un captage. Entre 2000 et 2020, par exemple, le dépassement des normes de concentration en pesticides ou nitrate dans les eaux souterraines potabilisables a ainsi conduit les producteurs d’eau à abandonner leur production dans 46 captages répertoriés.

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Les vertus de la prévention

 

La prévention est fondamentale et prioritaire. Aujourd’hui encore, l’option retenue en cas de pollution des eaux est en effet la solution curative, l’adaptation à court terme avec la dilution d’eau non conforme, le traitement ou l’abandon des captages. Pourtant 

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Il existe pourtant un consensus sur le fait qu'une réduction à la source des pollutions agricoles est bien moins onéreuse qu'un traitement des eaux avant distribution. Ce diagnostic est fondé sur les cas de régions ou villes étrangères, et d'agglomérations françaises, qui ont opté pour la prévention ; selon les cas, la facture serait divisée par 7 voire par...87*, selon les études.

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Sur les zones de captage, où les enjeux de qualité de l'eau sont plus importants, une étude de 2010 en Ile-de-France envisage les économies réalisées par la collectivité en cas de conversion totale des SAU agricole vers le bio. Les estimations d'économie se situent entre 49 et 309 €/ha/an (selon la méthodologie retenue, les zones de captage représentent entre 6 et 22 % de la SAU française).

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Dans ces conditions, pourquoi ne pas encourager directement l'agriculture biologique sur les aires de captage, pour supprimer les pollutions à leur source ? 

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*AESN. « Le préventif coûte-t-il plus cher que le curatif ? Argumentaire économique en faveur de la protection des captages ». EcoDécision. Juillet 2011

Agriculture bio et qualité de l'eau : un tabou ?

Pour la communauté scientifique et les pouvoirs publics, ce n'est pas un secret : l'agriculture a des impacts majeurs sur la qualité des eaux souterraines. Engrais azotés et pesticides de synthèses constituent l'essentiel des pollutions connues dans les eaux wallonnes.

Pas la peine toutefois de condamner les agriculteurs, qui dépendent d'un système agronomique largement répandu. Par contre, une prise de conscience rapide est nécessaire, pour assurer la qualité de l'eau et la santé publique et renforcer la résilience de nos territoires. 

Malgré ces diagnostics connus, peu de politiques publiques osent aller droit au but : encourager les agriculteurs à modifier en profondeur leurs pratiques sur les zones les plus touchées comme c'est le cas en France, par exemple. Les programmes de protection de l'eau développés depuis longtemps en Wallonie s'avèrent trop lent à fournir des résultats tangibles. Des solutions existent, pourtant, qui valorisent le travail des agriculteurs et ont un effet immédiat sur les masses d'eau souterraine.

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Parmi celles-ci, et si la plus efficace et rapide était l'agriculture biologique ? 

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